Fisimatentcher
Les mots ont une histoire. Certains viennent de la nuit des temps et ont « glissé » jusqu’à nous en subissant des transformations linguistiques et sémantiques si importantes que leur origine nous est masquée. D’autres apparaissent à un moment précis, liés à un événement particulier et sont typiques d’une région. Certains mêmes sont affublés de légendes… Ainsi le mot Fisimatentcher ou Fisimatenten.
Awwer weil loss no mét deinen Fisimatentchern ! (Maintenant arrête avec tes simagrées!)
Si on veut prévenir quelqu’un que ça va « barder » on pourra lui dire « pass òf, ich machen nét lang Fisimatentcher !» (litt : attention je ne vais pas faire longtemps des grimaces), autrement dit : je ne vais pas prendre des gants et faire de longs détours.
Les « Fisimatencher » sont donc des grimaces, des singeries, des fariboles et toutes autres circonvolutions de langage. Autrement dit tout ce qui ne va pas directement au but…
On dit que ce mot viendrait de « Visitez ma tente ». On sait en effet que durant la révolution de nombreux soldats français (Français de l’Intérieur !) campaient aux alentours de Sarrelouis et pour rompre leur solitude et agrémenter leur séjour ils invitaient les demoiselles du secteur à « visiter ma tente ». On peut imaginer le dialogue mère fille au retour de cette dernière.
- Wo worscht de dann nees geween ? (Où étais tu encore une fois?)
- Ich wor « visitez ma tente » (j’étais « visitez ma tente »)
- Eich génn der Fisimatencher, waart mol dau ! (mot à mot : moi, je vais t’en donner des « Fisimatencher », attends voir, toi !)
Et la mère prévenait le père : « Saa mol, us Finnchen wor nomol Fisimatencher machen mét de Franzosen » (mot à mot : dis donc, nôtre Fine était encore une fois faire des « Fisimatencher » avec les Français).
L’histoire ne nous dit pas ce qui advint de la Fine ni si les visiteuses de tentes militaires étaient nombreuses, mais nous savons que (hélas !) l’origine du mot est plus prosaïque et bien antérieure à la Révolution Française. Il remonte en effet à l’époque latine ou franque. Il pourrait provenir soit du latin « visum autenticum » qui sont les enjolivures autour d’une signature pour en certifier l’authenticité et donc par extension « des chose inutiles » ; soit encore du latin « visae patentes litterae » aboutissant à « visepatentes » qui étaient les autorisations accordées officiellement et par ironie « les tracasseries », donc tout aussi inutiles ! Il existe au Moyen Haut Allemand (aire linguistique du francique) le mot « visament » qui aboutira à « visemetent » et qui signifie « l’apparence » (das Aussehen). Et c’est là sans doute que se trouve l’origine directe de notre mot. « Visament » et « visepatentes » sont certainement de même origine linguistique.
Il faut savoir aussi que dans les dialectes bavarois et suisse le verbe « fieseln », dont l’origine est à rapprocher de « Fisimatentcher » signifie « se comporter de façon cérémonieuse », « minauder », « être affecté ». Et lorsque nous disons à quelqu’un « komm ma dauzen us ohne vill Fisimatentcher » (viens on se tutoie sans trop de « chiqué ») nous nous rapprochons de ce sens.
Kalenner
Dénschdach, 15 Oktober 2024
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"Beim Heiraten muss ma de Aen zoumachen; se ginn später von selwer op."